Ton actu

Ton actu

mardi 6 janvier 2015

La Chine affirme sa puissance


L’actualité de cette fin d’année 2014 aura eu pour invité VIP une ancienne et prometteuse amie : la Chine. Entre accords économiques, projets géostratégiques, politiques climatiques et débats démocratiques, la nouvelle première puissance économique mondiale est sur tous les fronts. Revenons sur les points forts de l’actualité de ce pays qui promet encore bien des surprises.

La Chine, première puissance économique mondiale ?
Curieusement,  la nouvelle n’a pas fait grand bruit lorsque le Fond Monétaire International  a publié en octobre ses chiffres pour l’année 2014. C’est début décembre que l’information a marqué les esprits, la Chine est désormais la première puissance économique du monde. Elle vole la vedette aux Etats-Unis qui avait détrôné la Grande-Bretagne en 1872. Effectivement, la Chine représente 16,5% du l’économie mondiale contre 16,3% pour la puissance américaine. Le FMI a aligné ses calculs sur l’indice « parité pouvoir d’achat », c'est-à-dire que la Chine peut se procurer la même quantité (et plus !)  de biens et services que les Etats-Unis même si le cours de sa monnaie est moins élevé. * La Chine affiche aujourd’hui un PIB de 17 632 milliards de dollars, l’année dernière elle revendiquait déjà un certain leadership en terme de commerce mondial avec plus de 4000 milliards de dollars d’échanges en 2013 et 12,1% des exportations mondiales. Pourtant, le pays a encore du retard concernant le PIB par habitant, il est au 89ème rang mondial, du fait de sa population abondante et du niveau de vie très bas.  D’autre part la décélération de l’économie chinoise se confirme, les indicateurs de la production industrielle et de l’immobilier étant toujours en croissance mais de façon moins rapide. Pourtant, pas de quoi inquiéter les dirigeants chinois qui préfèrent accorder la priorité à la qualité de la croissance plutôt qu’à son rythme effréné, caractéristique des dix dernières années. Pour cela ils comptent sur les investissements directs à l’étranger notamment.  A titre d’exemple, on retient la bataille pour le rachat de Club Med par le milliardaire chinois Guo Guangchang à la tête du groupe Fosun ou encore le rapprochement entre le groupe hôtelier Accor avec le groupe Huazhu. Selon Sébastien Bazin, le PDG d’Accor, ce rapprochement avec Huazhu « est la reconnaissance que les quatre groupes hôteliers chinois, qui n’existaient pas il y a dix ans, sont aujourd’hui les quatre premiers sur les secteurs du bas et du milieu de gamme en Chine ».La Chine affirme donc sa stratégie de montée en gamme. Malgré son léger ralentissement, l’évolution de sa croissance va sûrement continuer à marquer les esprits !

Un nouvel équilibre bipolaire en Asie-Pacifique
Par ailleurs, Xi Jinping, le président de la République populaire de Chine, a affirmé sa volonté de faire de la Chine plus qu’une puissance économique, un acteur majeur de la géopolitique en Asie et, à terme, dans le monde. Pour cela, la Chine lance l’idée d’une nouvelle zone de libre-échange en Asie du Sud-Est afin de contrer l’influence américaine. Au sommet de l’Apec (Coopération économique pour l’Asie-Pacifique) en novembre dernier, Xi Jinping a dévoilé son vaste projet régional économique et diplomatique dans lequel la Chine tiendra la place centrale faisant concurrence à l’Accord de partenariat transpacifique (PTP) négocié dans la région par les Etats-Unis. Elle développe aussi une nouvelle liaison ferroviaire, la « nouvelle route de la soie » entre Duisbourg, en Allemagne, et Chongqing en Chine. Cette référence au passé glorieux de l’Empire du milieu et des ses excellentes relations avec l’Europe depuis le IIè siècle avant J.C, illustre parfaitement la volonté diplomatique de la nouvelle Chine : une stratégie double de rapprochement, l’une en direction de l’Occident et l’autre vers l’Orient. Ainsi, alors que le président chinois a rencontré cinq fois Vladimir Poutine au cours de l’année, il a entretenu avec Barack Obama des relations beaucoup plus froides.  II faut cependant retenir l’accord sur le climat conclu simultanément par les Etats-Unis et la Chine début novembre et qui engage cette dernière à diminuer ses émissions de gaz polluants à partir de 2030 mais apparaît en réalité être une bien faible avancée…

Une puissance encore loin d’être exemplaire
Toutefois, si elle veut réellement s’affirmer en tant que leader, la Chine doit encore soigner son image. En effet, le pays reste ancré dans une tradition éloignée de notre archétype démocratique. La façon dont ont été calmées les manifestations à Hong Kong en est la preuve. Cette ancienne colonie britannique, rétrocédée à la Chine depuis dix-sept ans, conserve un statut spécial avec une justice indépendante et une plus grande liberté d’expression qu’en Chine continentale. Pourtant, depuis septembre, des mouvements pro démocratiques, conduits par des étudiants, ont vu le jour dans trois lieux symbolique de la ville. Les manifestants réclament le suffrage universel, le changement de mode de scrutin ainsi que le départ du chef de l’exécutif hongkongais. Ainsi, la situation illustre bien le paradoxe entre une Chine moderne, ouverte au monde et la ligne dure que conserve le gouvernement de Xi Jinping pour sa politique intérieure.  Fin novembre les campements des jeunes protestataires ont été évacués de force, donnant lieu à quelques heurts violents ainsi qu’à des arrestations. Depuis, les mouvements peinent à s’accorder entre ceux qui, comme 78% de la population, souhaitent mettre fin aux contestations et ceux qui souhaitent continuer la lutte. Ainsi, cette « révolution des parapluies » ne s’est soldée que par un courtois dialogue de sourd. Les autorités centrales chinoises n’ont pas modifié leur ligne de conduite pour 2017 : le chef de l’exécutif sera élu parmi deux ou trois candidats désignés par un comité de 1200 grands électeurs, laissant une voix plus que mineure au peuple hongkongais.

La Chine, nouveau numéro un économique, au pouvoir géopolitique grandissant doit donc encore faire face à de nombreux défis si elle veut pouvoir connaitre durablement elle aussi le statut de superpuissance mondiale, comme ont pu l’être la Grande-Bretagne et les Etats-Unis le siècle dernier.


Pauline T.


*Lindice parité pouvoir d'achat (PPA) permet de comparer le pouvoir d’achat entre pays par rapport à un « panier » de produits. Par exemple, avec ce calcul, un café à la même valeur en Chine qu’aux Etats-Unis.